Devant ce croquis de Ronald Searle (que j’ai découvert à l’annonce de sa mort), je ne peux m’empêcher de me comparer à ce chat. Lui ne rêve que de poisson, moi je ne rêve que de ces gâteaux, encore plus appétissants que ma gourmandise ne peut l’imaginer. Et je me lèche les babines devant cette image, me voilà prise en flagrant délit de souhaiter être ce chat. Lui est dans la photo. Pas moi !
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Ronald Searle, l’élégance piquante du cartooniste
Il affectionnait les chats et les escargots, qu’il croquait d’un trait élégant et caustique, au piquant jamais acerbe. Le dessinateur anglais Ronald Searle, 91 ans, s’est éteint le 30 décembre 2011 à Draguignan (Var), où il vivait depuis plus d’un demi siècle. De lui, on connaît surtout les matous souvent matois, ou les scènes satiriques publiées dans Le Monde, The New Yorker ou The International Herald Tribune.
Les Britanniques, eux, ont été particulièrement marqués par la série St Trinian’s, qui met en scène dès 1948 des écolières malveillantes et incontrôlables, qui sirotent de l’alcool et manient les armes comme qui rigole. L’engouement pour ces diablesses est tel que des films sont tournés – ils donneront lieu à des remakes au mitan des années 2000. L’artiste est pourtant lassé de ces petits monstres adulés, et tentera de les tuer sur papier en 1952 (il lance une bombe atomique sur leur école), sans succès.
Né à Cambridge en 1920, Ronald Searle grandit dans une famille modeste, qui encourage son don pour le dessin. A 15 ans, il vend ses premiers croquis au Cambridge Daily News, finançant ainsi ses cours du soir. Volontairement engagé dans le génie militaire, il est envoyé à Singapour, capturé en 1941 par les Japonais et forcé de travailler à la construction de la ligne de chemin de fer Birmanie-Thaïlande, où les hommes meurent à tour de bras. Malgré la dysenterie et la malaria, il survit pendant quatre ans, ne lâchant jamais son crayon. « Tout le monde avait un livre avec une page blanche, racontait-il en 2005 dans un entretien à la BBC. On me donnait ces papiers, et je dessinais dessus. Cela me permettait de tout enregistrer, de me transformer en caméra. »
De retour à la vie civile, il s’intéresse à l’actualité, couvrant pour Life Magazine la campagne présidentielle de JFK en 1960 ou le procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem l’année suivante. Influencé par le travail de l’Allemand George Grosz, et lui-même influence revendiquée de nombreux artistes – dont Matt Groening, le créateur des Simpson –, Ronald Searle avait le sentiment de n’avoir jamais quitté la prison construite par les Japonais. Une situation qu’il semblait avoir acceptée, affirmant que, « pour créer, il faut être isolé ».
Laurence Le Saux (Télérama)
Le 5 janvier 2012
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